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Peu d’écrans, beaucoup de talents



Plus grand festival de cinéma sur le continent africain, le Fespaco s’est ouvert à Ouagadougou. 239 films présentés, dont 19 en compétition, qui témoignent d’un renouveau générationnel, même si la distribution de films reste entravée par manque de salles.


Polyphonie du réel et puissance poétique. Projeté hors-compétition, le film Atlantique, de la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop, a ouvert samedi 16 octobre la 27e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco), au Burkina Faso. Tout un symbole : avec ce film, Mati Diop a été la première cinéaste femme d’origine africaine ayant remporté le Grand Prix à Cannes, en 2019. Entre chronique sociale et conte surnaturel, Atlantique évoque le drame de l’exil et de l’immigration en choisissant de filmer celles qui restent au pays et qui attendent, brisées, dévastées. Mati Diop « tient un plaidoyer à la fois poétique, politique et onirique appelant à ne pas baisser les bras face aux drames de l’émigration clandestine dans les pays africains », écrivait Siegfried Forster sur le site de RFI. « Elle choisit une façon inédite de braquer la caméra sur la situation d’une jeunesse sénégalaise tellement désespérée qu’elle est prête à plutôt mourir qu’à rester. Son but : montrer le drame de l’exil vu par les forces féminines. »

Plus grand festival de cinéma sur le continent africain, le Fespaco présente une sélection de 239 films en provenance de 50 pays. Reportée pour cause de pandémie, cette 27e édition est qualifiée d’«édition du renouveau», qui vise à mettre en avant les nouvelles générations. La compétition officielle regroupe 17 films, provenant de 15 pays différents. Un jury international, présidé par le réalisateur et producteur mauritanien Abderrahmane Sissako (lauréat du César du meilleur film pour Timbuktu en 2015) décernera le 23 octobre l’Etalon d’or du Yennenga, la récompense suprême du Fespaco. Les projections se déroulent dans les différentes salles de Ouagadougou, dont celle du cinéma Neerwaya (1 066 places), mais aussi dans plusieurs espaces en plein air, dont un aménagé place de la Nation, l’une des plus grandes de la ville.

Le nouveau délégué général du Fespaco, Alex Moussa Sawadogo, titulaire d’une maîtrise en Histoire de l’art à l’université de Ouagadougou et d’un master professionnel de management culturel et des médias obtenu à Hambourg, en Allemagne, a créé en 2007 le Festival des films d’Afrique de Berlin. (voir ICI son interview par TV5 Monde). Passionné de cinéma…et de danse contemporaine, il entend montrer que «malgré la situation sanitaire, le continent continue à créer, à rêver, à pouvoir résister à tous les maux qui minent nos sociétés.»

This is not a burial, it’s a resurrection, de Lemohang Jeremiah Mosese.

Photo : Arizona Distribution.


Signe de cette dynamique, la sélection officielle révèle des pays pratiquement inconnus de la carte mondiale du cinéma, comme la Somalie avec La femme du fossoyeur, d’Ahmed Khadar (présenté au dernier festival de Cannes dans la Semaine de la Critique), la Namibie, avec The White Line de la réalisatrice Desiree Kahikopo-Meiffret avec, ou encore le Lesotho avec This is not a burial, it’s a resurrection, de Lemohang Jeremiah Mosese, artiste visuel réalisateur autodidacte dont c’est le troisième film. Présenté en France au dernier festival de La Rochelle (sous le titre L’Indomptable Feu du printemps), This is not a burial, it’s a resurrection a d’ores et déjà reçu le Prix spécial du jury au festival Sundance aux Etats-Unis. Il y est question de la construction d’un barrage qui menace de submerger une vallée. Mantoa, 80 ans, doyenne d’un petit village niché dans les montagnes, décide d’en défendre l’héritage spirituel et ravive l’esprit de résistance de sa communauté. « Le choix des chants, des couleurs, le jeu sur le floutage, la façon de cadrer les champs de vision annoncent un film pensé comme une pièce de musée, où il faut prendre le temps de la découverte et de la réflexion. (…). En fait, le long métrage constitue une sorte d’invitation spirituelle et sensible au lâcher-prise », écrit Laurent Cambon sur le site avoir-alire.com.

« Avec Mati Diop (Atlantique), Amjad Abu Alala (Tu mourras à 20 ans) et quelques autres, Mosese fait partie d’une vague de renouveau dans le cinéma africain sud-saharien, travaillant une mise en scène ample et ambitieuse, qui interroge l’identité culturelle et politique d’un pays, ainsi que les décombres du colonialisme », ajoute Oriane Picant dans So Film.


L’Unesco signe un partenariat avec Netflix


This is not a burial, it’s a resurrection est le tout premier film de fiction à avoir été tourné au Lesotho, un État enclavé dans le territoire d’Afrique du Sud, qui compte… 3 salles de cinéma pour 2 millions d’habitants. Plus généralement, l’Afrique est le continent avec le moins de salles de cinéma, avec en moyenne, un écran pour 787 402 habitants, comme l’indique un récent rapport de l’Unesco (L’industrie du film en Afrique. Tendances, défis et opportunités de croissance, 271 pages, à consulter ICI). C’est aussi le continent où il y a le plus de piraterie par rapport au secteur formel audiovisuel. Pour Ernesto Ottone, sous-directeur général pour la Culture de l’Unesco, le numérique doit permettre « une plus grande distribution des contenus, des histoires et des identités ». C’est ainsi que l’Unesco, pour « trouver les réalisateurs de demain » en Afrique subsaharienne, vient de signer un partenariat inédit… avec Netflix !

De son côté, le Fespaco a mis en place un volet professionnel avec les ateliers Yennenga pour, d’une part, accompagner des films au stade de post-production, et d’autre part, assurer une formation courte et professionnalisante aux métiers du cinéma. Et les organisateurs du festival ont prévu des colloques pour approfondir la réflexion sur le thème du financement du cinéma et de l’audiovisuel, de la distribution et la circulation des œuvres et de la formation « en vue de proposer des solutions qui puissent permettre de sortir le secteur du cinéma et de l’audiovisuel de l’emprise des pesanteurs économique, sociale et politique qui freinent son essor sur le continent. »


Photo de couverture : Signée Sahab Koanda (lire ICI), la statue d'un caméraman devant le siège du Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco) à Ouagadougou. Photo Olympia de Maismont / AFP.


Liste des 17 longs métrages fiction en compétition au Fespaco 2021 : Air conditioner, de Mario Bastos (Angola) ; Baamum Nafi, de Mamadou Dia (Sénégal) ; Bendskins (Moto Taxi), de Narcise Wandji (Cameroun) ; Eyimofe (This is my desire), de Chuko Esiri (Nigéria) ; Farewell Amor, d’Ekwa Msangi (Tanzanie) ; Feathers, d’Omar El Zohainy (Egypte) ; Freda, de Gessica Geneus (Haïti) ; La femme du fossoyeur, d’Ahmed Khadar (Somalie) ; La nuit des rois (Night of the Kings), de Philippe Lacôte (Côte d’Ivoire) ; Les trois lascars, de Boubakar Diallo (Burkina Faso) ; Lingui, les liens sacrés, de Haroun Mahamat-Saleh (Tchad) ; Nameless (Les anonymes), de Wa Nkunda Mutiganda (Rwanda) ; Oliver Black, de Tawfik Baba (Maroc) ; Souad, d’Amin Ayten (Égypte) ; The White Line, de Desireee Kahikopo-Meiffret (Namibie) ; This is not a burial, it is a resurrection, de Jeremiah Lemohang Mosese (Lesotho) ; Une histoire d’amour et de désir, de Leyla Bouzid (Tunisie)


Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco), jusqu’au 23 octobre à Ouagadougou (Burkina-Faso) : https://fespaco.org/

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