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Il y a 40 ans, naissance des «émeutes urbaines».


En août 1983, François Mitterrand à Vénissieux, où une première tour d’immeubles vient d’être détruite.

Photo AFP.


HISTOIRE. C’était il y a 40 ans tout juste. Le 9 juillet 1981, à Vénissieux, en banlieue lyonnaise, débutait «l’été chaud des Minguettes», apparition dans le paysage public des «émeutes urbaines» qui n’ont depuis lors cessé de défrayer la chronique.


Le 9 juillet 1981, il y a tout juste 40 ans, débutaient dans le quartier des Minguettes, à Vénissieux, les premières « émeutes urbaines ». A vrai dire, les premières scènes d’émeute ont surgi en 1979 à Vaulx-en-Velin (toujours en banlieue lyonnaise) dans le quartier de la Grappinière. Condamnant le « harcèlement policier » dont ils estiment être victimes, des jeunes affrontent les forces de l’ordre et incendient des voitures. Les affrontements se multiplient, entre 1979 et 1980, à la cité Olivier-de-Serres, à Villeurbanne (Rhône), avant que le maire socialiste Charles Hernu (futur ministre de la Défense de François Mitterrand) décide de raser ce « vivier à délinquance ». Sont concernés 336 logements habités par 2 300 personnes. Aujourd’hui, on ne parle plus de démolition, on parle de « rénovation urbaine », ça fait plus chic.

A partir du 9 juillet 1981, jusqu’en septembre, de violentes émeutes éclatent dans le département du Rhône, d’abord aux Minguettes, à Vénissieux, puis à Villeurbanne et à Vaulx-en-Velin. Les « émeutes urbaines » s’invitent pour la première fois dans les journaux télévisés (cf Journal de 20 h sur France 2 du 7 septembre 1981 avec PPDA tout droit sorti du brushing, où le maire communiste de Vaulx-en-Velin, Jean Capievic, demande simultanément une politique de répression et le développement d'une politique culturelle : c’est curieux comme souvent, ça va ensemble…)

Les événements attirent l'attention du pays sur le « malaise des grands ensembles ». De son côté, le ministre de l'Intérieur Gaston Deferre appelle à la répression policière pour « combattre le banditisme ». De ce « malaise des grands ensembles, Jean-Jacques Goldman en fait une chanson, en s'installant dans la banlieue lyonnaise et en essayant de discuter avec les habitants et ses jeunes: Envole-moi, qui devient un tube : « Minuit se lève en haut des tours / Les voix se taisent et tout devient aveugle et sourd / La nuit camoufle pour quelques heures / La zone sale et les épaves et la laideur (…) Règles du jeu fixées mais les dés sont pipés / L'hiver est glace, l'été est feu / Ici, y'a jamais de saison pour être mieux »)


« Démocratie est tombée »

En août 1983, François Mitterrand fait une visite surprise à Vénissieux, où une première tour d’immeubles vient d’être détruite. Les démolitions se poursuivent. Le 10 octobre 1994, aux Minguettes, dix tours (murées depuis dix ans) sont détruites à l’explosif. Le quartier s’appelait « La Démocratie ». Comme le dit l’envoyée spéciale d’Antenne 2 à Vénissieux : « Démocratie est tombée ».


Durant l'été 1983, de nombreux contrôles policiers sont conduits aux Minguettes. Pendant un affrontement, Toumi Djaïda, le jeune président de l'association locale SOS Avenir Minguettes, qui a entre autres organisé une grève de la faim contre les violences policières et l'impunité des auteurs de crimes racistes, aide un jeune attaqué par un chien policier ; il est atteint par une balle. Le préfet de police de Lyon, Bernard Grasset, affirme que l'auteur du tir ne sera pas inquiété par la justice parce qu'il a fait usage de son arme en légitime défense. Toumi Djaïda est transporté d'urgence à l'hôpital, gravement blessé au ventre. L'événement lui inspire, avec le soutien du père Christian Delorme (par ailleurs militant actif du Groupe d’action et de résistance à la militarisation -GARM- créé par des chrétiens progressistes et des libertaires lyonnais) et du pasteur Jean Costil, de la CIMADE, l'organisation de la Marche pour l’égalité et contre le racisme (surnommée par les médias « marche des beurs »), qui va de Marseille à Paris d'octobre à décembre 1983, sur le modèle de la marche du sel de Gandhi et des mouvements noirs aux Etats-Unis pour la défense des droits civiques. Le Parti socialiste récupérera ensuite cette initiative, avec la création en 1984 de SOS Racisme (cf Histoire secrète de SOS Racisme écrit par Serge Malik, l'un des fondateurs du mouvement).

Entre temps, en décembre 1981, le gouvernement instaure une Commission nationale pour le développement social des quartiers (CNDSQ), afin de lutter contre la « ghettoïsation des quartiers défavorisés ». Une vingtaine de sites sont classés « îlots sensibles ». Le gouvernement crée également des zones d’éducation prioritaire (ZEP) pour enrayer l’échec scolaire.

Quarante ans plus tard, on constate surtout l’échec gouvernemental en matière de politiques de la ville. C'est cet échec-là qu'il faudrait enrayer d'urgence.


Jean-Marc Adolphe, 9 juillet 2021.

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